Aujourd’hui, quatre murs n°176/366

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Nous étions entre les quatre murs des vestiaires de la salle de sport, lorsque j’ai entendu cette petite phrase « Tu sais, de toute façon, je pense que l’on y passera tous ! ».

Cette phrase, prononcée par la prof de sport qui se préparait à nous donner un cours, ne m’était pas du tout adressée.
C’est ce genre de fragments que j’intercepte souvent, où que je sois. Des bribes de conversation, une grimace étrange, des sensations communes qui s’échappent, flottent jusqu’à moi, se déposent dans mon cerveau, et, sans aucune volonté de ma part, m’envahissent jusqu’à devenir miennes.

Comme ça, on pourrait penser à de la curiosité, comme si je cherchais à tout entendre, tout savoir….Vous pouvez me croire ou non, j’aurais souvent préféré ne pas savoir, ne pas comprendre…Simplement attendre d’être concernée, quand je l’étais …C’est ainsi…Dans cette situation, je me mets en boule, je me pétrifie, je teste mon imperméabilité. Là, il était déjà trop tard et je le savais…Son signal m’avait mise en alerte, sa tristesse coulait dans mes veines. Je crois que techniquement, on appelle cela de l’empathie.

Alors que mon plus grand besoin était de la serrer fort dans mes bras, cette parfaite inconnue dont la souffrance ne m’était plus étrangère, je me suis redressée et suis sortie des vestiaires. Tandis que j’atteignais la salle, j’essayais de me persuader qu’elle ne parlait pas d’elle, que j’avais mal compris ce tremblement dans sa voix… S’il s’agissait d’elle, n’aurait-elle pas fait preuve de plus de discrétion ? S’il s’agissait d’elle, ce drame n’aurait-il pas, au contraire, repoussé sa pudeur, en échange d’un peu de sollicitude ?
Elle paraissait si jeune… (Quelle réflexion idiote « Elle paraissait si jeune » ! Comme s’il y avait un âge pour tomber malade, comme si, un jour, un matin en se réveillant, on décidait d’avoir assez vécu… )

Elle est entrée dans la salle, si belle, si fine. Sa tenue de sport découvrait ses épaules et ses bras ciselés par un entrainement sportif intense. Elle souriait, puis elle a dit : «A partir de la semaine prochaine, je serai absente pendant au moins un moi. Je vous abandonne entre les mains des jeunes. Moi, je serai à l’hôpital. »

 

©Emilie BERD

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1- Ecrit sur le vif : NON

2- Moins de 100 mots :  368 mots MEGA OUPS!

3- Elément réel : ok

10 réflexions au sujet de « Aujourd’hui, quatre murs n°176/366 »

  1. J’espère de tout mon cœur que cette jeune femme résistera à toutes les agressions à venir et que toi et les enfants, retrouveraient son sourire.
    L’empathie, un mot que tout un chacun pratique souvent, à bon ou mauvais escient.
    Un sentiment qui peut faire souffrir mais qui peut aussi embellir nos vies.
    À pratiquer avec modération lorsqu’on est trop sensible, mais comment faire ? Je m’y suis laissée prendre tellement de fois ! Bisous

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